Ma vie sur la route, mémoires d’une icône féministe de Gloria Steinem

Ma vie sur la route, mémoires d’une icône féministe de Gloria Steinem

Ma vie sur la route est un vrai témoignage sur l’Amérique d’aujourd’hui. Ou plutôt sur l’Amérique et ses contradictions. Steinem revient sur les grands combats qu’elle a menés, sans jamais les lâcher: les droits civiques, la question noire, le féminisme, les amérindiens, les homosexuels, les immigrés, les « travailleuses du sexe », la lutte des classes, la sécurité sociale, les violences sexuelles. Entre autres. J’en oublie sûrement. La journaliste féministe a sillonné l’Amérique pour aller au devant des Américains, au devant des oubliés, des défavorisés, des maltraités, pour militer en faveur de politiciens, de questions politiques, de l’avortement, de droits divers et variés. Toujours au nom de la liberté. Souvent pour l’égalité.

Les États-Unis, terre de contraires, d’hypocrisie et de hiérarchies. Pays où l’on avorte, mais où les médecins qui pratiquent l’avortement se font tuer. Nation dont la Constitution et le gouvernement se sont inspirés de la Confédération Iroquoise, héritage d’un peuple que l’Amérique a massacré et annihilé systématiquement pendant des siècles. Terre de la démocratie mais dont le résultat aux élections de 2000 (souvenez-vous, Bush contre Gore) est encore très controversé, à cause de votes non recomptés en Floride. Et surtout d’une mise à l’écart de certaines catégories de la population qui auraient pu faire basculer le résultat. Et éviter bien des choses, dont la guerre en Irak et les conséquences que l’on connaît, dont on souffre encore aujourd’hui. Dont on souffrira encore longtemps.

Extraits.

« J’ai enfin l’occasion de rencontrer le Dr Tiller en 2000, à New-York, à une réunion de Physicians for Reproductive Choice and Health, une association qui milite pour l’amélioration des politiques de santé et la liberté de procréation. Je lui demande s’il a déjà pratiqué des interruptions de grossesse sur des femmes qui manifestaient devant son établissement. « Bien sûr, me répond-il. Je suis là pour les aider, pas pour ajouter à leurs problèmes. Elles doivent se sentir assez coupables comme ça. »En 2009, un activiste qui se cachait dans l’église luthérienne où les Tiller se rendaient chaque dimanche l’abat d’une balle dans le crâne. Toujours au nom de la défense de la vie. »

« En 1980, je monte dans un avion bondé pour détroit. Je me retrouve au milieu d’un groupe de juifs hassidiques (…) Je remarque des échanges de sièges précipités. Manifestement, aucune femme ne doit être assise à côté d’un homme qui n’est pas son mari ni à côté de moi (…) Je constate que la priorité semble être de m’isoler des femmes. J’entends le mot féministe en anglais au milieu du discours en yiddish des deux jeunes gens assis devant nous et les vois se retourner pour m’observer entre les dossiers. A l’aéroport de Detroit, je me rends aux toilettes où je tombe sur les épouses et les filles. La plus jeune jette un coup d’oeil vers les portes derrière lesquelles ont disparu ses aînées, me regarde droit dans les yeux et sourit. « Bonjour, Gloria, dit-elle d’une voix assurée. Je m’appelle Miriam. » Ce sourire efface tout le reste. »

Hommage aux grands militants des grandes causes, mais aussi aux américaines et aux américains qui militent seuls, de leur côté, dans leurs réserves en Pays Indien, dans leurs taxis, avions, maisons, écoles, entreprises, universités, villes et villages. La féministe met en avant les individus en guerre contre l’extrémisme, le sexisme, l’injustice, les inégalités sociales, la sécurité sociale inégalitaire et presque inexistante.

Plus qu’un récit façon road trip à travers l’Amérique, Steinem nous livre un épinglage des grandes questions sociales de l’Amérique. Avec toujours beaucoup d’espoir.

J’ai beaucoup appris auprès de Gloria Steinem, le livre regorge d’histoire politique, d’anecdotes, de culture et de références pointues. J’ai lu par exemple, qu’il y avait des sites archéologiques indiens millénaires que l’on pouvait observer dans différents Etats comme le Serpent Mound en Ohio ou dans le Mississippi. Allez voir les images ur internet, c’est stupéfiant. J’ai aussi découvert qu’Harvard était il y a encore très peu de temps un repère misogyne où les femmes n’avaient le droit de prendre la parole en classe qu’une fois par mois. J’ai lu qu’Hô Chi minh s’était battu au côté des américains pendant la seconde guerre mondiale et qu’il connaissait la Déclaration d’Indépendance par coeur. J’ai appris qu’en Allemagne, en 2005, « selon les réformes de l’aide sociale allemande, toute femme de moins de 55 ans au chômage depuis plus d’un an peut-être contrainte d’accepter un poste, y compris dans l’industrie du sexe , ou de devoir renoncer à son allocation ».

Édifiant.

Pour compléter sur une vision autre de l’Amérique, une vision critique dirons-nous, je conseillerais aussi la lecture d’une Histoire populaire des États-Unis de 1492 à nous jours, d’Howard Zinn.


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