Lire et entendre


Il y a peu, sur Brut, j’ai vu une vidéo de Clémentine Beauvais au cours de laquelle elle racontait la gêne de certains élèves croisés lors de rencontres littéraires qui lui avouaient qu’ils n’avaient pas lu son livre mais qu’ils l’avaient ÉCOUTÉ. Et l’autrice de s’écrier que lire OU écouter un album, c’était la même chose! Que c’était inutile de se passer la rate au court bouillon, les mots arrivaient de la même manière dans la caboche du lecteur, un point c’est tout. Je brode un peu, mais en gros, l’idée, c’était ça.

Et ben moi, j’adhère totalement au point de vue de Clémentine (que de plus, j’admire secrètement, c’est peut-être un peu pour ça…).

Le livre audio a toujours eu une grande importance chez les miens. Ma grand-mère maternelle était institutrice et grande lectrice, ce qui forme le combo parfait pour mes premiers souvenirs d’apprentie lectrice, grande romantique que je suis. Aussi loin que je me souvienne, je me rappelle avoir lu chez ma grand-mère. L’hiver, enfermée dans son salon envahi par les livres et les pelotes de laine, recroquevillée dans le vieux sofa près du feu ronronnant dans la cheminée à l’âtre. L’été, dans le jardin, au milieu du petit verger, enfoncée dans une chilienne au tissus rayé décoloré par le soleil. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Ma grand – mère avait déniché je ne sais où une valisette emplie de cassettes audio. Celle-ci était accompagnée de livrets que l’on manipulait en écoutant les histoires et un petit carillon nous incitant à tourner la page pour passer à la suite. Que j’ai pu écouter ces histoires… Il y avait Les habits neufs de l’empereur et La poule aux oeufs d’or. Ils ont été écouté à gogo par mes cousins et moi et nous ont accompagné dans l’apprentissage de la lecture. Je me souviens qu’une fois lectrice, j’adorais encore les écouter, entendre le lecteur lire et imiter les voix des différents princes, princesses, empereurs ou animaux. Et ce petit carillon, je le reconnaîtrais entre mille. Il me renverrait aussitôt à l’époque de mes six ans, des livres aux pages au parfum de vieux papier, à ce vieux poste audio de ma grand-mère, ces cassettes rouges et or et ce petit chien au pelage odorant qui dormait à nos pieds.

Evidemment, avec ce petit laïus façon Proust, vous vous doutez bien que je vais vous faire l’éloge du livre audio. Vous avez évidemment raison. Le livre audio sous toutes ses formes fait l’unanimité chez nous: celui du plus petit, que l’on presse pour écouter des sons, des extraits de morceaux de musique classique, de jazz ou de rock ou encore les bruits de la ferme, des doudous ou de la ville. Et les livres audio de grands, avec ces disques que l’on introduit dans le poste de papa, l’ordinateur de maman ou le lecteur de la voiture. Ces disques qui racontent des contes de tous les pays ou des histoires bien connues de la littérature jeunesse. Il y en a gogo.

Le fameux Mozart, raconté par François Morel

Pléthore ont notre préférence. Mais ces derniers temps, il y a surtout Paco, petit chien créé par Magali Le Huche, qui voyage et nous fait découvrir la musique de la fanfare, celle de Mozart en passant Londres et ses accointances avec le rock’n’roll. Il y a évidemment les livres audio de Didier jeunesse, que si vous êtes des habitués des bibliothèques et librairies, vous connaissez sûrement très bien. Vous savez, ces couvertures gigantesques, magnifiquement illustrées qui laissent entrevoir un croissant argenté du disque collé à l’intérieur de la couverture. À la maison on a Mozart et Sati, racontés par l’excellent François Morel. Les enfants l’adorent et peuvent l’écouter plusieurs fois à la suite (et pourtant il est plutôt long). Ils en connaissent des répliques par coeur, énoncées par l’accent goguenard de Morel :  » Ton épée pour te battre avec des saucisses! » revient plusieurs fois par jour et est toujours suivie d’éclats de rires qui n’en finissent pas.

Mais notre déesse à tous, désolée M. Morel, c’est Élodie Fondacci. Comment ça, vous ne la connaissez pas? Elodie Fondacci, de Radio Classique et ses Histoires en musique! En podcast ou en livres (édités chez Gautier -Languereau), la douce et chaude voix de madame Fondacci nous fait passer les trajets en voiture les plus sereins qu’ils soient. Elle égaie aussi nos soirées en captivant les enfants, nous permettant de passer une heure peinards avant le marathon du coucher et du brossage de dents. Le Casse Noisette, le Lac des cygnes, le Carnaval des animaux, La belle au Bois Dormant, les histoires qu’elle conte sont nombreuses et les enfants adorent. Et nous aussi. On aime tellement que lorsqu’on lit de notre côté des albums à nos enfants, on essaie de lire comme Élodie, mais bizarrement, la magie fonctionne moins bien.

Cependant, la grande dame a vu sa cote baisser récemment car il y a une nouvelle conteuse arrivée dans la maison. C’est la Lunii ou la Fabrique à histoire, vous connaissez? C’est une sorte de petite radio interactive, sur laquelle il y a 48 petites histoires, que l’on créé au fur et à mesure du choix des enfants. Personnages: Gaston ou Suzanne? Lieu de l’action: château ou plage? Histoire de pirate ou de sirène? Dès le premier jour à la maison en compagnie de la Lunii, mon fils aîné a écouté des histoires pendant deux heures, sous sa cabane de couvertures et de chaises. Et Ô miracle, il n’ a pas demandé à regarder la télévision!

La Fabrique à Histoires, au milieu des kaplas

Et évidemment, lorsque on est parent, tata, tonton, nounou, mamie d’enfants non lecteur, rien ne vaut le moment où l’on lit des histoires à ses enfants. Bien nichés au creux de l’oreiller, au fond du canapé ou sur la pelouse du jardin, quel délice d’imiter la voix de Lou le loup, de râler comme Ron Wesaley, d’hurler comme Simon, de pleurer à l’école comme Léon et de prendre le ton du commentateur d’Arte ou de France Culture pour raconter la vie au Moyen-Âge.

Et en ces jours étranges et confinés, l’écoute de l’histoire est primordiale pour clore une journée d’activités! Même pour les plus grands!


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